Séminaire – « L’IA (dé)générative ou le pari ambitieux des modèles en SHS »

22 octobre 2025 – 14h00 à 17h00
Salle immersive – UMR LISA, Bâtiment Edmond Simeoni

 

­L'IA (dé)générative

ou le pari ambitieux des modèles en SHS

 

@ChatGPT le 7 octobre 2025 à 21h30 :

Cite-moi un poème de Baudelaire.

Réponse :

Voici un poème extrait des Fleurs du mal de Charles Baudelaire, intitulé "L'Albatros" :

"L'Albatros"

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage?

Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,?

Qui suivent, indolents compagnons de voyage,?

Le vaisseau glissant sur les gouffres amers.

A peine ont-ils posé leurs pieds sur le pont qu'ils sont?

Désormais incapables de reprendre leur vol.?

Ils sont pris dans la mailles des filets,?

Et souvent les marins les enchaînent par les ailes?

Pour les exposer à la dérision des autres.

***

L’IA générative est ancrée dans le quotidien. Les grands modèles de langue (LLM) sont considérés à la fois comme des outils d’aide à l’écriture, à la traduction voire au raisonnement. Ils remplacent peu à peu les moteurs de recherche traditionnels tant leurs prédictions, bluffantes, suggèrent l’inutilité de toute critique. Qu’en est-il pour les SHS ? L’exemple de L’Albatros de ChatGPT est frappant, il montre à la fois le potentiel et les limites de l’IA générative. Les LLM sont capables de générer des suites de mots qui donnent le change. Les rapports syntagmatiques ou associatifs que le lecteur projette fabriquent un discours qui semble reproduire le sens du poème. Et pourtant, sous la couche de vernis linguistique apparaît une réponse de ChatGPT tout à fait absurde, l’IA dégénère au bout de quelques vers. Plus de poésie et une faute d’orthographe tout à fait banale en guise de blasphème fait à Baudelaire. La raison est simple, l’IA n’a aucune intention et aucun impératif référentiel, l’IA fabrique seulement des imitations probabilistes de textes.

Dans notre intervention, nous proposerons d’analyser les méandres algorithmiques des IA génératives afin de délimiter le champ de recherche qu’offrent les LLM aux Humanités. Si les usages prêtent à la controverse, nous verrons que les leviers techniques responsables des artifices textuels interrogent directement les recherches en sciences du langage (la linguistique saussurienne comme l’analyse du discours). Nous inscrirons ensuite notre réflexion en linguistique de corpus où les data gagneraient à devenir des corpora (Rastier, 2021) dans une posture herméneutique appliquée aux sorties générées par l’IA. Enfin, nous présenterons le logiciel Hyperbase doté d’un ensemble d’outils statistiques et de propositions d’implémentations d’IA à vocation heuristiques dans la longue tradition française d’analyse de données textuelles.

F. Rastier, « Data vs corpora », in D. Mayaffre & L. Vanni (dir.), L'intelligence artificielle des textes, Champion, 2021, p. 211-212.n

 

L’UMR 6240 LISA organise une demi-journée de séminaire consacrée aux Humanités numériques et aux enjeux de l’intelligence artificielle dans les sciences humaines et sociales.

Intervenant invité :

• Laurent Vanni, Ingénieur de recherche CNRS (UMR BCL 7320, Université Côte d’Azur)

Responsable scientifique :

• Joseph Dalbera, MCF HDR, Università di Corsica

 

Ce séminaire s’inscrit dans le cadre du Master Métiers de l’écriture (FLLASHS), mais reste ouvert à tous les étudiants, enseignants et chercheurs intéressés par les plateformes d’analyse de données textuelles et les applications de l’IA en SHS.

 

Entrée libre et gratuite

 

• Affiche à télécharger